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Lettre de Fernando Silva de la prison de La Santé (5-12-2000)



Resistencia n°53, février 2001

Bonjour à tous,

Maria Victoria et moi avons été arrêtés ensemble vers 14h20 (le 9 novembre comme d’autres camarades). Victoria se reposait sur sofa car elle se sentait fatiguée, moi je feuilletais la presse. Tout était apparemment "tranquille" jusqu’à ce que deux forts coups (deux petites charges explosives) quasi simultanés firent exploser la serrure de la porte. Victoria eut juste le temps de s’asseoir à moitié et moi de faire deux pas vers la porte quand une bande d’énergumènes nous tombèrent dessus en criant "Police ! Ne bougez pas !" Ils étaient masqués, portaient des gilets pare-balles, avaient les doigts sur la gâchette des pistolets qu’ils tenaient de deux mains. C’était un corps de la gendarmerie (la OCRB) similaire au GEO. Ils étaient plus que nerveux, c’est pourquoi je leur ait dit "tranquilles" ce qui a le même sens en français. Ils nous mirent des menottes aux mains et aux pieds (aux pieds des menottes de plastique blanc) et nous jetèrent face à terre. Ils nous changèrent trois fois de fers, chaque corps qui arrivait mettant les siens.

Ils me dirent que je pouvais m’estimer content que ce soient eux qui interviennent et non la police ou la garde civile espagnole, sinon je serais déjà mort à cette heure. La vérité est que ceux-là respectent encore un peu les formes, bien que, pareillement, ils nous repartissent dans différentes prisons sans possibilité de communiquer ni à l’intérieur, ni à l’extérieur. Les autres prisonniers politiques que j’ai vu, de Bretagne, de Corse, les Basques tous ont été très solidaires quand ils ont su que j’étais ici et ils m’ont fourni des vêtements et quelque chose à manger. Ici aussi on ne peut communiquer que par étage dans chaque bloc. Avant que j’oublie, j’ai reçu de l’argent de l’AFAPP du Pays basque et de mon frère José-Manuel, ainsi je n’ai pas besoin d’argent jusqu’à l’année prochaine. Quel négoce ils ont monté dans les prisons françaises. Tu dois tout acheter du papier hygiénique aux savons etc. J’ai reçu une carte postale de Galice très jolie. Hier on m’a appelé au Palais de Justice pour me notifier que j’étais en prison (au cas où je ne m’en serais pas rendu compte) préventive en attente de l’extradition que demande le gouvernement espagnol.

Enfin, collègues, quant à l’arrestation, comme il arrive souvent dans ce cas, ils nous ont pris "détendus". De plus cela a coïncidé avec une série de mesures d’ajustement interne, quelques transferts qui nous ont obligés à faire des mouvements "exception- nels" diminuant un peu la vigilance. Il faut y ajouter des fâcheries internes réelles, peut-être dans le but de nous distraire [...] Pour finir, comme on a l’habitude de dire dans ces cas : courage à tout le monde. Nous avons fait un bon bout de chemin, et si nous avons résisté et grandi au milieu des difficultés, il n’y a rien qui nous empêche de continuer à apprendre de nos expériences et de continuer à renforcer la flamme révolutionnaire.

Amour et résistance la victoire est certaine !

Salut

Fernando Silva Sande, "Anton"





Sources : http://apa.online.free.fr/article.php3?id_article=51